Trois questions à Stéphane Malbos, Président de l’Association « Mémoire du lycée polonais Cyprian-Norwid »
Stéphane Malbos est l’un des sept enfants de Marcel et Denise Malbos, professeurs au lycée polonais de Villard-de-Lans. Il passe sa jeunesse à Villard-de-Lans où ses parents ont ouvert leur propre collège, La Clarté. Stéphane parcourt le monde pendant cinq ans comme « routard », puis comme steward/chef de cabine pendant vingt-huit. Pratiquant le deltaplane et le parapente, il écrit dans les magazines spécialisés. Tôt à la retraite, il s’investit dans le monde associatif sportif et mémoriel. Son engagement est tel qu’il se décrit comme « bénévole professionnel ». La découverte des archives de son père sur le lycée polonais est le début d’une vingtaine d’années de recherche et d’écriture. Un livre publié par les PUG (Des résistants polonais en Vercors), un espace muséal permanent à Villard-de-Lans et un nouveau site Internet très complet en sont les meilleurs représentants.
1 – En 1940, le lycée polonais Cyprian Norwid s’installe à Villard-de-Lans. Pouvez-vous nous présenter l’histoire de ce lycée ?
Septembre 1939, la Pologne est envahie par l’Allemagne et l’URSS. Le gouvernement polonais s’exile en France puis en Grande-Bretagne quand la France est à son tour vaincue. Sa priorité : continuer le combat, mais aussi protéger et éduquer les jeunes réfugiés qui sont l’avenir de la Pologne.
« Former, pour la Pologne future, dans cette enclave familière, bien qu’éloignée de la patrie, une nouvelle génération de l’intelligentsia, alors que l’actuelle se fait systématiquement exterminer ». Bronisław Bozowski, aumônier.
Zygmunt Lubicz-Zaleski et Wacław Godlewski sont chargés de fonder en zone libre un établissement d’études secondaires polonais. Grenoble semble idéale : ville universitaire, nombreux réfugiés, proximité de la Suisse neutre et bienveillante. Plutôt que Grenoble, un village discret est choisi : Villard-de-Lans et ses hôtels désertés depuis le début de la guerre. Le 18 octobre 1940, le lycée polonais Cyprian Norwid ouvre ses portes.
Pourquoi Cyprian Norwid ? Né en 1821, émigré volontaire en Europe, aux États-Unis puis en France, poète, artiste et philosophe, il est le chantre de la transformation de l’idée en action, la Pologne représente pour lui, comme pour les élèves de Villard, la valeur suprême. Il meurt en 1883 et ne sera connu et reconnu que bien plus tard.
Les premiers élèves sont recrutés dans les refuges et camps de travail : principalement soldats démobilisés et évadés de camps de prisonniers et quelques enfants réfugiés de guerre. Les enfants de l’émigration d’avant-guerre viennent renforcer les effectifs. Ils deviennent, au fil des ans, majoritaires. Les professeurs sont d’une grande qualité, qu’ils soient universitaires, ingénieurs ou jeunes diplômés.
« Ni caserne, ni patronage, mais une communauté qui se serre les coudes, un havre de paix où nous sommes passés de l’âge d’adolescents à celui d’hommes ». — Lucjan Owczarek, élève.
L’organisation générale réunit les traditions des deux pays. Les programmes sont basés sur ceux des écoles polonaises, mais s’adaptent à la réalité française. Les cours se déroulent en polonais. L’enseignement du français est renforcé. En fin de cycle, les élèves passent le « Matura », reconnu équivalant au Baccalauréat, qui donne accès à l’université.
L’activité culturelle est intense : théâtre, fêtes traditionnelles… La chorale rayonne particulièrement à Villard, dans l’Isère et au-delà. Les équipes sportives obtiennent des résultats spectaculaires. Les conditions de vie sont rigoureuses. Pour améliorer l’ordinaire, une ferme est louée au quartier des Geymonds et les élèves participent aux travaux des champs. D’autres internats sont ouverts à Villard-de-Lans et à Lans-en-Vercors.
« L’existence même du lycée était un acte de résistance, même si le mot n’existait pas encore, contre l’occupant et pour la liberté de tous ». — Marcel Malbos, professeur.
Le lycée n’est pas seulement un refuge pour faire des études dans de bonnes conditions. Il est un lieu de renouveau moral, intellectuel, spirituel et patriotique. Il est aussi une école de caractère et un lieu de résistance active. Les règles strictes qui régentent la vie quotidienne sont l’expression d’une discipline indispensable au désir d’incarner la patrie.
« Pendant six ans, Villard est devenu un coin de Pologne, pendant six ans, ces Polonais sont devenus des Villardiens ». André Ravix, maire de Villard-de-Lans de 1971 à 1977.
Entre communautés française et polonaise, une certaine méfiance existe, mais avec le temps, elle laisse place à la curiosité, puis à la sympathie et au respect. Bientôt, Polonais et Français se battront côte à côte contre les Allemands.
« Nous avons pris ici un rendez-vous avec l’histoire, nous avons relevé son défi. Tous, dans notre conscience, étions des combattants par vocation et libre choix ». — Wacław Godlewski, fondateur, directeur et professeur.
Le lycée participe aux mouvements de résistance polonais et français. Des actions sont menées à Villard même. Le prix de cette résistance est élevé : une trentaine de déportés, trois y laissent la vie. La direction organise le passage des étudiants et réfugiés vers la Grande-Bretagne via les Pyrénées. Plus de quatre-vingt-dix élèves et professeurs tentent l’aventure. Ceux qui réussissent participent à la libération de la France et du reste de l’Europe. Neuf y laissent la vie.
Le 16 juillet 1944 à Villard, vingt-sept Polonais sont recrutés pour rejoindre le maquis, la plupart à Vassieux. Quand les Allemands donnent l’assaut au Vercors, six élèves sont massacrés. Dans les jours suivants, cinq autres Polonais périssent.
Dans une France libérée, le lycée redevient une école presque comme les autres. La joie de la libération est troublée par la formation, en Pologne, d’un gouvernement contrôlé par l’URSS. Un vice-directeur est imposé, surnommé « l’œil de Moscou ». Il exige, sans beaucoup de succès, des changements pédagogiques. Le gouvernement en exil n’est plus reconnu. Le 30 juin 1946, les portes du lycée se ferment définitivement. Un nouveau lycée polonais s’ouvre à Paris, Cyprian Norwid n’est plus son patron.
« Ne pas obstinément se parer la tête de lauriers fanés, mais aller de l’avant avec les vivants et bâtir une vie nouvelle ». Adam Asnyk, poète polonais.
Élèves et professeurs se dispersent. Faut-il retourner au pays et le servir, même sous le joug communiste, ou refaire sa vie ailleurs ? Chacun choisit sa route, marqué à jamais par l’histoire commune vécue et par les valeurs partagées.
« L’expérience de cette école, sa vitalité́, l’ampleur de ses aspirations, la vigueur de sa détermination, la valeur de ses réalisations, portent encore aujourd’hui leurs fruits ». Wacław Godlewski.
Depuis 1974, les anciens se retrouvent chaque année à Villard pour se souvenir et construire la mémoire de ces années exceptionnelles. Ils s’appellent entre eux et à jamais : Villardczycy – les Villardiens.
2 – De 1940 à 1944, les Polonais participent pleinement à la résistance en Isère. Qu’en est-il exactement ?
Je ne suis pas un spécialiste de la Résistance en Isère, qui est un vaste département. Je pourrais évoquer ce qui est dit dans le livre récemment publié, Parcours de Polonais dans le Secteur 1 de la Résistance en Isère, Grenoble et Basse Romanche, 1939-1945. Ces Polonais sont 179, de toutes origines. Dans sa première partie, des repères historiques sont donnés et l’organisation de la Résistance polonaise décrite. Est aussi détaillé ce qui arrive aux réfugiés et militaires démobilisés de notre région après la débâcle de mai-juin 1940, leur répartition dans des centres d’accueil et camps de travail, les financements… Les centres et camps, dans le Secteur 1 comme dans les sept autres secteurs de l’Isère, seront une précieuse source de recrutement.
Je préfère raconter l’histoire du Centre d’Études créé à Grenoble et sa région à la demande du Gouvernement polonais en exil à Londres.
Cet été 1940, Wacław Godlewski, lecteur de polonais à Lille, s’est réfugié dans le Gard où il reçoit la visite de Zygmunt Lubicz-Zaleski, délégué de la Pologne pour l’Instruction publique, pour créer un Centre d’études polonais. En 1945, Godlewski revient de déportation (Mauthausen) très marqué. En 1947, il est débriefé par E. Perroy qui construit un dossier sur la Résistance polonaise en France. Extraits…
Début septembre 1940, Godlewski reçut à Alès la visite de Zaleski qui avait retrouvé sa trace et lui demanda de l’aider à organiser à Grenoble, dans la zone libre, un Centre d’études polonais. Il s’agissait de créer un lycée et un centre d’étudiants dont le but principal serait de camoufler de jeunes Polonais, presque tous d’âge mobilisable ou anciens mobilisés. Tous deux se rendirent à Vichy où ils eurent une conférence à quatre avec Zabiello, chargé d’affaires du gouvernement polonais auprès du gouvernement de Vichy et Alexandre Kawałkowski, ancien consul général de Pologne à Lille.
Il fut décidé la création du Centre d’études et les pleins pouvoirs furent donnés à Godlewski pour l’organisation matérielle.
L’organisation au Centre d’études polonaises comprenait :
1 — Le Lycée polonais de Villard-de-Lans. Il arriva à Grenoble le 1er octobre 1940 et dénicha à Villard-de-Lans un hôtel vide qu’il loua. Il s’occupa, avec les autorités universitaires françaises, de l’organisation du lycée dont toute la clientèle était formée de soldats polonais démobilisés ou d’évadés de captivité. L’ouverture du lycée eut lieu le 18 octobre. (NDLR : Se reporter à la question précédente.)
2 — Le centre d’étudiants de Grenoble. Il s’organisa au cours de l’année scolaire 1940-1941 et comprit jusqu’à deux cent seize étudiants inscrits. La plupart étaient d’anciens militaires, des officiers camouflés, auxquels s’agrégèrent peu à peu quelques Juifs de nationalités diverses qu’on fit passer pour des Polonais aryens. Les autorités universitaires décidèrent de dispenser les étudiants polonais de tous leurs droits d’inscription et la Croix Rouge polonaise prit en charge leurs droits de travaux pratiques.
3 — Parallèlement s’organisa de très bonne heure la résistance militaire. Godlewski avait des contacts très nombreux avec les réfugiés polonais en France, répartis par le gouvernement de Vichy dans une série de centres d’hébergement, tandis que beaucoup d’hommes étaient envoyés dans des camps de travailleurs où les conditions de vie étaient très défectueuses. On arriva à tirer des camps tous les intellectuels ; ils furent répartis dans les centres.
Petit à petit s’organisa un système d’évasion des jeunes Polonais vers l’Angleterre, d’abord vers l’Algérie par voie de mer, ensuite par la frontière espagnole. Les premiers départs eurent lieu sur initiatives particulières. Le réseau commença à fonctionner dans le courant de l’année 1941.
Le Centre devint une organisation militaire pour la zone sud. Grenoble en était le siège en raison du grand nombre de Polonais qui y résidaient. La région des Alpes contenait le plus grand nombre de centres de réfugiés polonais de toute la zone sud. L’invasion de cette zone et l’occupation de Grenoble par les troupes italiennes en novembre 1942 ne changèrent rien à l’activité des Polonais, au moins au début.
Le 19 mars 1943, Zaleski fut arrêté à Grenoble et déporté à Buchenwald. Godlewski fut obligé de tout réorganiser. La situation à Grenoble devint de plus en plus tendue. En octobre 1943, à la demande des Allemands, le gouvernement de Vichy ordonna l’évacuation de tous les centres d’accueil polonais et leur transfert dans le Massif central. Godlewski resta sur place. Un certain nombre d’élèves et étudiants purent être encore dirigés vers la frontière espagnole.
Dans le domaine de la résistance plus active et à caractère plus spécifiquement militaire, le Centre était sous la direction du commandant Gaberle. Ses prédécesseurs avaient été assez négligents, en sorte que beaucoup de convois d’évadés se faisaient prendre à la frontière espagnole. Il réorganisa si bien les filières qu’il n’y eut plus de pépin.
Pendant l’hiver 1943-1944, Godlewski s’occupa activement à liquider le Centre d’étudiants de Grenoble en faisant partir le plus de monde possible vers l’Espagne. Bientôt il ne resta plus qu’une trentaine de jeunes gens et quelques jeunes filles. D’ailleurs dès le début de 1944 ces étudiants ne venaient plus aux cours. Ils se cachaient dans les villages de montagne et ne venaient à Grenoble, en cachette, que pour toucher les secours mensuels qu’on leur accordait.
La surveillance policière allemande se resserra de plus en plus sur le lycée. Le 2 mars 1944, Godlewski se rendit à La Tronche pour une réunion clandestine chargée d’examiner la situation générale, de régler l’attribution des bourses du mois, de discuter des possibilités d’envoi en Espagne des derniers étudiants retardataires et enfin d’examiner la situation d’un groupe d’étudiants juifs particulièrement menacés. Une lettre de convocation dut tomber entre les mains de la Gestapo. Tous les participants furent arrêtés. On arrêta même deux Belges, voisins de palier du lieu de réunion : en tout treize personnes. Seuls les deux Belges et une jeune fille furent libérés peu après. Tous les autres furent déportés.
Le Centre en tant que tel cessa son activité. Les Polonais du lycée continuèrent le combat. Vingt-quatre y laissèrent leur vie.
3 – L’association Mémoire du lycée polonais Cyprian-Norwid — Villard-de-Lans 1940-1946, témoigne d’un évènement exceptionnel. Pouvez-vous nous présenter votre association ?
« Je n’aime pas l’expression “devoir de mémoire”. Le seul devoir c’est d’enseigner et de transmettre ». Simone Veil, déportée, académicienne, femme d’État.
En 1958, à Cracovie, une trentaine d’anciens élèves se rassemblent pour créer un cercle d’anciens Villardiens qui regroupera tous les élèves du lycée résidant en Pologne, de même que son corps enseignant. Ce cercle organise régulièrement des réunions. À Paris, une Amicale des anciens élèves se forme également. Elle siège dans les locaux du lycée polonais, version 1946-1947, au 15, rue Lamandé.
En 1974, à l’approche du 30e anniversaire des combats du Vercors, poussés par le maire de Villard, André Ravix, les anciens élèves et professeurs de France et Pologne décident de créer l’ « Union des anciens du Lycée Polonais Cyprian Norwid, à Villard-de-Lans, et de leur famille — Amicale Villardczycy ». Une première réunion rassemble seize Villardiens venus de Pologne, Angleterre, Belgique, USA et France. Parmi eux, leur très actif président, Lucjan Owczarek, grand Résistant au carnet d’adresses bien rempli.
La mise en place de l’association prend du temps et le second rassemblement se tient à Villard en 1976. Il rassemble quelque quatre-vingts Villardiens, dont plus de trente venus de Pologne. Une plaque est dévoilée sur les murs de l’hôtel du Parc et du Château et une Rue du lycée polonais Cyprian Norwid est inaugurée.
L’association se préoccupe d’abord des souvenirs polonais dans le Vercors : noms gravés sur les monuments aux morts et dans les cimetières, tombeaux polonais de Villard et de La Doua, en banlieue lyonnaise. Elle prend une part active aux cérémonies commémoratives. Elle s’efforce d’obtenir la reconnaissance des mérites des professeurs et amis vivant encore en France : Wacław Godlewski, Philippe Blanc, Marcel Malbos et André Ravix recevront la Croix d’Or du Mérite polonais, une des plus hautes distinctions polonaises. Villard-de-Lans en tant que ville recevra plus tard cette même distinction, ce qui est rare.
À Varsovie, une « rue des Villardiens » est baptisée. D’autres plaques et monuments sont inaugurés en Pologne. Des expositions sont organisées. Deux livres sont publiés en polonais : une « bible » historique et un recueil de biographies.
Dans les années 1980, des actions humanitaires sont organisées par des anciens élèves et professeurs et par la municipalité de Villard pour faire parvenir en Pologne des vivres, médicaments et fournitures diverses.
Les années 1990 voient plusieurs expositions et colloques organisés principalement à Paris, et la disparition de deux grandes figures du lycée : Wacław Godlewski, fondateur du lycée et professeur, et Marcel Malbos, professeur de français au lycée et président d’honneur de l’association.
Au tournant du siècle, Lucjan Owczarek décède. Henri Gielec le remplace à la présidence. Les anciens vieillissent, leur énergie diminue et l’association devient surtout un point de ralliement pour les anciens du lycée, pour leurs amis et pour leur descendance. Chaque année, début septembre, l’assemblée générale se déroule traditionnellement à Villard-de-Lans. Un moment fort, quand chacun se retrouve et partage.
Les anciens s’inquiètent de la disparition probable de l’association quand, en 2006, la découverte et le partage des archives du professeur Malbos par son fils Stéphane donnent un second souffle à l’association. Le travail de mémoire reprend : traductions, publication de livres en français, expositions, conférences, site Internet, rénovation des monuments…
En 2010, l’association s’ouvre vers l’extérieur. Avec la disparition progressive et inexorable des acteurs directs de la saga du lycée, elle modifie ses statuts pour accepter tous ceux qui sont intéressés par la mémoire de cet événement exceptionnel, par sa mise en valeur, par sa mise en disponibilité au grand public et aux chercheurs francophones. La présidence de l’association passe des épaules d’anciens élèves à celles de leurs enfants, d’abord Stéphane Malbos puis Georges Nowak. Au-delà du symbole, l’engagement que le travail de mémoire se poursuivra.
Et ce travail se poursuit : publication de livres, conférences, expositions, documentaires, et un espace muséal permanent à la Maison du Patrimoine de Villard. L’année 2024 a été particulièrement riche avec une exposition à Londres et une autre à Lans-en-Vercors puis à Villard-de-Lans. Deux jours de « Variations polonaises » à Villard : lecture théâtralisée, documentaires, chants, danses, gastronomie. Participation à l’écriture et à la publication de deux livres sur la Résistance de Polonais dans le Secteur 1 de la Résistance en Isère. Et la mise en ligne d’un nouveau site Internet très complet et bientôt trilingue sur l’histoire du lycée, « Foyer des libertés », et sur celle de notre association et de ses actions, avec la mise en ligne d’une grande partie de nos archives : rassemblements, manifestations, publications, vidéos… et plus de 1 500 photos d’époque !
Toutes nos actions ne seraient pas possibles sans le soutien sans faille de la Fondation Zaleski, du nom de Zygmunt Lubicz-Zaleski, fondateur du lycée, mise en place dans les années 1990 par Romain Zaleski, son fils, et dont la petite-fille, Hélène, gère la trésorerie. Merci !
En connaitre plus ? www.lycee-polonais.com
Les lieux de mémoire
Plaques commémoratives, tombes et monuments, rue des Villardiens et rue du Lycée polonais… La mémoire s’inscrit aussi dans le paysage urbain.
À Villard-de-Lans
Place de la Libération, au cœur du bourg et à quelques pas du Château (aujourd’hui Office de Tourisme), La Maison du Patrimoine propose un espace muséal permanent consacré au lycée : « Foyer des libertés ».
La « rue du Lycée Polonais Cyprian Norwid » jouxte l’emplacement de l’hôtel du Parc et du Château. Elle a été inaugurée en 1976.
Sur les murs du Château, une plaque commémorative a été apposée en 1976, avec ces mots : « Ici, dans l’ancien Hôtel du Parc, fut installé d’octobre 1940 à juin 1946 le lycée polonais Cyprian Norwid, seul établissement libre d’enseignement secondaire polonais en Europe occupée. » La plaque originelle a été détruite lors de la rénovation du Château et remplacée par la plaque actuelle.
Le monument aux morts comporte les noms des dix élèves, professeurs, personnels du lycée tombé dans le Vercors.
À l’entrée du cimetière, le tombeau des Polonais accueille les corps de deux élèves et deux professeurs tombés dans le Vercors : Henryk Czarnecki, Witold Nowak, Kazimierz Gerhardt et Jan Harwas. En 1996, le directeur Wacław Godlewski a été inhumé dans ce caveau. En 2012, un élève décédé de maladie en 1945, qui reposait à quelques mètres du caveau, a rejoint ses camarades. Une plaque du Souvenir Français est apposée.
La 7e station du Chemin de Croix de Valchevrière a été construite juste après la guerre, dans le style des chapelles de Zakopane. Les noms des vingt-quatre Polonais tombés au combat y sont gravés avec cette inscription : « Pour la liberté, la justice, la dignité de l’Homme, pour la France et la Pologne, sont morts aux champs d’honneur, ont souffert dans les prisons et camps de concentration les professeurs, les élèves, les employés du Lycée Polonais Cyprian Norwid. »
Un transept de l’église Saint-Bruno révèle un tableau représentant Notre Dame d’Ostra Brama. Il est l’œuvre du père d’un élève qui en fit don au lycée en 1942. Il fut installé dans le réfectoire. À la fermeture du lycée, il fut offert aux Villardiens en remerciement de leur hospitalité et transporté solennellement dans l’église.
À Vassieux-en-Vercors
Dans la nécropole nationale est apposée une plaque à la mémoire du lycée.
À La Doua
Dans la nécropole nationale de la Doua, à Villeurbanne, sont enterrés dans le carré polonais (A, rang 10, n° 70 à 73) trois élèves et un employé : Jerzy Delingier, Léon Pawłowski, Jimmy Hernik et Ludwik Wilk.
À Paris
Rue Lamandé, dans la cour de l’École des Batignolles, une plaque est dédiée à la mémoire d’élèves, professeurs et employés de l’École polonaise et du lycée polonais Cyprian Norwid décédés au combat ou en déportation.
À Montmorency
Dans la nécropole polonaise du cimetière des Champeaux sont enterrés Cyprian Norwid et Zygmunt Lubicz-Zaleski.
Une plaque commémorative en l’honneur du lycée est apposée sur un mur.
À Varsovie, Pologne
Dans le quartier d’Ursyńow, une « Rue des Villardiens » a été inaugurée en 1998.
Dans la cathédrale Saint-Jean se trouve une plaque commune avec les anciens élèves de l’école Boglar en Hongrie.
Dans la crypte de l’église Sainte-Croix, une plaque a été inaugurée en 1986.
À Walbrzych, Pologne.
Une « Rue de Villardiens » a été inaugurée en 2012.
Pour en savoir plus : www.lycee-polonais.com
Trois questions à Damian Polkotycki, Président de la Fédération des associations d’Anciens Combattants Résistants et Mutilés de Guerre Polonais en France
Damian Polkotycki s’est engagé dans diverses associations liées aux anciens combattants polonais, notamment au sein de la Maison des Anciens Combattants Polonais – SPK France, dont est membre du bureau national. En 1992, il fonde l’Association du musée de l’Armée Polonaise en France qu’il préside jusqu’en 2005. En 1995, il intègre en tant que Trésorier la Fédération des associations d’Anciens Combattants Résistants et Mutilés de Guerre Polonais en France dont il devient Président en 2023.
1 – La Fédération des associations des anciens combattants, résistants et mutilés de guerre polonais en France fédère de nombreuses associations. Pouvez-vous nous présenter votre fédération ainsi que son histoire ?
Dans le but de centraliser et de coordonner le travail des associations combattantes et d’anciens combattants en France, la Fédération des Associations d’Anciens Combattants, Résistants et Mutilés de Guerre Polonais en France (FPOO) a été créée en 1928 sous l’impulsion du Maréchal Ferdinand Foch et de l’Ambassadeur de Pologne Alfred Chlapowski. Ses membres en étaient les représentants des associations issues des légions polonaises du Maréchal Jozef Pilsudski, de l’Armée du Général Jozef Haller et de toutes les formations issues des guerres contre les troupes bolcheviques.
En septembre 1939, la Fédération a dû faire face à son plus grand défi ! Avec l’aide de tous ses membres, elle a activement recruté des volontaires pour l’armée polonaise en France. Des bureaux de recrutement ont été ouverts à Lille, Paris, dans l’est, le centre et le sud de la France. Plus de 20 000 volontaires se sont inscrits au cours des premiers mois !
La Fédération a été suspendue durant la Seconde Guerre mondiale puis réactivée en 1949.
Francziszek Kedzia, de l’Association des Anciens Combattants en France (ZRibWRP – créée en 1918), a été élu président, suivi des présidents Czarnecki, Rey, Dulmen et Ursyn-Niemcewicz de l’Association des Anciens combattants Polonais en France et leurs familles – Entraide Polonaise – (SPK – créée en 1945). En 1995, Stanislaw Stankiewicz, président de l’Association des Anciens Combattants en France (ZRibWRP), a été élu.
Sa mission était entre autres de sauvegarder les monuments et les cimetières des soldats polonais morts lors des deux guerres mondiales et de construire de nouveaux monuments et cimetières en France. Parallèlement, elle a fourni une aide matérielle aux anciens combattants en Pologne.
Opposé aux autorités consulaires de la République Populaire de Pologne, la Fédération a œuvré pour faire vivre l’indépendance polonaise.
Tout au long de ses 60 ans d’histoire, la Fédération a toujours été intransigeante dans son opposition au régime communiste polonais !
La tâche actuelle de la Fédération est guidée par les mêmes objectifs et idéaux que ceux que nos ancêtres ont défendus et pour lesquels ils ont donné leur vie, ainsi que cela est précisé sur l’emblème à l’aigle blanc couronné et la devise BOG – HONOR – OJCZYZNA (Dieu – Honneur – Patrie) est inscrite sur nos bannières.
L’Assemblée Générale de la plus importante des composantes actuelles de la Fédération, à savoir SPK France, du 10 octobre 2020 et celle de la Fédération du 21 avril 2023 ont encore confirmé le rôle moteur de coordination et d’organisation en France en particulier dans les relations avec les autorités française et polonaise, tant civiles que militaires.
La présence française de la Fédération sur le territoire français aujourd’hui est la suivante :
2 – L’histoire de la présence des combattants polonais en France est particulièrement forte. Quel jugement portez-vous sur cette histoire ?
Afin de comprendre l’engagement européen des combattants polonais, il convient d’avoir à l’esprit l’articulation suivante : mais qu’ont-ils pu ramener de bénéfique en retour pour leur patrie ?
Au début du XIXe siècle, les combattants polonais ont acquis une expérience de combat aux côtés des armées napoléoniennes en Italie entre 1797 et 1807 et forment un vivier militaire important qui constituera la première grande émigration militaire vers la France, après l’éphémère Grand-Duché de Varsovie de 1807 à 1814. De nombreux soldats polonais décidèrent de rester en France et constituèrent le point de départ de la communauté polonaise (Polonia) qui s’élargit après la Grande Emigration de 1831.
La capitale française est devenu le haut-lieu du combat de la Polonité et de l’activisme diplomatique et politique, matérialisé par l’école des Batignolles, à partir de 1842. De nombreuses associations culturelles ou sportives vont se créer comme les Sokols. Cela formera le vivier des futurs combattants volontaires polonais en France en 1914-1918.
Au cours de la Première Guerre mondiale, un premier grand dilemme va se poser aux états-majors polonais. En 1914, une grande partie de la population française ignorait tout de la situation géopolitique de la Pologne , l’Etat polonais n’existait plus, et ne comprenait pas pourquoi autant de Polonais combattaient dans les rangs allemands et austro-hongrois. Les Polonais étaient alors perçus comme des agents étrangers.
L’armée polonaise s’était regroupée dès 1914 aux frontières Est de l’Europe autour des légionnaires de Piłsudski et de son Organisation militaire clandestine, des fusiliers sibériens du général Józef Dowbor-Muśnicki, 1er Corps polonais en Russie, ainsi que des partisans du général Haller.
Créée par la suite en France en juin 1917, l’armée polonaise commandée par le général Haller rentre en Pologne deux ans plus tard. Bien formée et expérimentée, l’Armée bleue est immédiatement envoyée sur le front ukrainien où elle lutte, notamment, contre un corps de cavalerie de l’Armée Rouge, commandé par le général Boudionny. Ses soldats combattront ensuite sur les différents fronts : à l’Est, dans le Sud et dans le Sud-ouest de cet État polonais naissant.
Pour les Polonais, la Première Guerre mondiale ne s’est pas terminée en 1918, mais bien plus tard en mars 1921, lors de la paix de Riga signée avec la Russie soviétique. Certes, la Pologne recouvre son indépendance à la fin du conflit mondial, mais ses frontières sont mal définies et fragiles.
Les Polonais ont payé un lourd tribut au cours de ce conflit. On estime entre 2,5 millions et 3,4 millions le nombre de Polonais qui ont combattu sur les fronts d’Europe.
À la fin de la Première Guerre mondiale, l’État polonais s’est reconstitué sous l’impulsion du Maréchal Ferdinand Foch, du Capitaine Charles de Gaulle et de l’armée française qui aida la Pologne à reconquérir sa place en Europe, comme barrière à la Russie bolchévique.
Quant à la Seconde Guerre mondiale, l’importante participation des combattants polonais tant lors de la Bataille de France de 1940 que pendant la Résistance et pour la Libération du pays en 1944, fait l’objet de l’article de Jacques Wiacek : « L’œil de l’historien ».
3 – Le 80ème anniversaire de la victoire des Alliés sur le nazisme est un moment important pour la France comme pour la Pologne. Quelles actions mènera votre fédération à cette occasion ?
Pour l’Europe occidentale, le 8 mai 1945, l’heure était à la liesse populaire. Cependant, pour les Polonais, cette date est souvent synonyme de défaite nationale et a laissé un goût amer d’abandon de la Pologne par ses alliés.
En effet, les Polonais avaient combattu sur tous les fronts, avec la même ardeur que s’ils avaient combattu sur leur territoire national, mais ne furent pas conviés au rendez-vous de la victoire des Alliés.
L’armée polonaise comptait vers la fin de la guerre environ 250 000 hommes prêts à regagner leur patrie après 6 longues années de combats. 150 000 soldats se trouvaient encore dans les camps en Allemagne. 6 millions de Polonais avaient été tués dans les camps de concentrations, dont 3 millions de juifs polonais victimes de la Shoah.
Les traités de Téhéran en 1943 et de Yalta en 1945, durant lesquels la Pologne avait été abandonnée par une partie de ses alliés, n’avaient pourtant pas freiné l’engagement de l’Armée Polonaise, 4ème Armée Alliée, consciente de ce marchandage et pourtant présente dans tous les combats, sans interruption, en Asie Mineure, Afrique et Europe de 1939 à 1945.
Malgré l’avènement du communisme en Pologne, en 1945, de nombreux soldats et officiers polonais quittent l’Angleterre et retournent en Pologne, bravant le risque de se faire arrêter, fusiller pour nombre d’officiers, plutôt que de subir les sarcasmes des populations qu’ils avaient aidé à libérer. Certains généraux, tel le Général Stanislaw Maczek, ont notamment été contraints de devoir s’employer comme barman et garçon d’ascenseur en Angleterre.
Cependant il fut nommé citoyen d’honneur à Breda au Pays-Bas, comme tous les soldats de la 1ère DB Polonaise ; il y est d’ailleurs enterré, l’ultime retour vers la Pologne lui ayant été également interdit.
Cette année, nous avons choisi comme point saillant pour la Pologne la commémoration du 85ème anniversaire de l’embarquement des combattants polonais vers la Grande- Bretagne, le 18 juin 1940, à partir de Saint-Jean-de-Luz, après la campagne de France. Cette commémoration du 85ème anniversaire de l’embarquement des combattants polonais vers la Grande-Bretagne, le 18 juin 1940, conclura celles de juin, août et septembre 2024, et celles de mai 2025, et souligne que la détermination de ces combattants polonais à poursuivre la lutte, à l’image des Résistants de toutes nationalités, restés sur le sol français, protégeant ce qui pouvait rester d’honneur.
La Fédération coorganisera cet événement avec l’association d’Amitiés Pays basque – Pologne, la municipalité de Saint-Jean-de-Luz avec le concours des autorités civiles et militaires françaises et polonaises.
La plupart des combattants polonais avaient déjà combattu une première fois en mai-juin 1940, en Champagne et en Lorraine, les armées allemandes entrées en France, notamment la 1ère Brigade motorisée du Général Stanislaw Maczek, qui reviendra quatre ans plus tard sur le sol français, contribuant à la libération de la Normandie et du Nord de la France.
L’essentiel des combattants polonais s’étant embarqué par les ports de France était :
• L’aviation polonaise : quelque 8 000 hommes rapatriés principalement de Hongrie et de Roumanie, des patrouilles de chasseurs ayant été employées à la défense des aérodromes français, quelque 1 000 aviateurs ne pouvant plus embarquer ont été internés dans le camp d’Idron, près de Pau, et seront exfiltrés progressivement par les Pyrénées.
• La 4ème Division d’Infanterie polonaise sous les ordres du général Dreszer, surprise dans la région de Saumur par les troupes allemandes. 6 000 des 11 0000 hommes formés rejoignirent l’Angleterre par les ports de Bretagne.
• La 3ème Division polonaise, sous les ordres du colonel Zieleniewski, assurant un barrage de 40km de long destiné à fermer l’entrée de la Bretagne, avant de s’embarquer également pour l’Angleterre par La Turballe et Le Croisic.
D’autres combattants assurèrent le maintien opérationnel durant quatre longues années :
• La marine polonaise, s’étant échappée de Pologne par la Baltique, comptant 22 navires de guerre, 8 sous-marins et 54 navires marchands, participera activement aux embarquements des combattants en 1940, et plus tard au Débarquement allié en Normandie.
• Les officiers polonais créant les réseaux F2, POWN à Toulouse puis dans le Nord de la France dès juin 1940 formant le noyau dur de la Résistance Polonaise. Le 23 juillet 1940, le 1er contact radio sera établi avec le gouvernement polonais en exil à Londres, et avec le Général de Gaulle.
D’autres combattants polonais s’embarqueront vers la Grande Bretagne, quatre ans plus tard :
• la Brigade des Carpathes constituée en Syrie française par l’Armée française.
•le 2ème Corps d’Armée polonais, sous le commandement du général Wladyslaw Anders.
Le dernier port de départ des combattants polonais fut Saint-Jean-de-Luz, le 18 juin 1940.
Au mois de juin 1940 l’évacuation des combattants alliés engagés dans la bataille de France a commencé : l’opération « Cycle », l’opération « Dynamo » puis l’opération « Ariel » que nous allons commémorer le 18 juin 2025.
Des soldats belges, britanniques, français, polonais et tchèques ont embarqué sur ces navires pour éviter d’avoir à rendre les armes, parmi eux le fils du Maréchal Ferdinand Foch, sous uniforme polonais. Ils reviendront quatre ans plus tard en Normandie pour participer à l’opération « Overlord ».
Le 23 juin 1940, les navires Sobieski et Batory partis deux jours plus tôt transportent 9 000 Polonais. Reste à embarquer 5 000 Polonais et 3 000 Tchèques.
Le 24 juin, finalement, 2 000 femmes sont autorisées à embarquer sur le Batory et le Sobieski.
Pour en savoir plus : foo.france@free.fr
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