Suite à la lecture de l’article « Guerre d’Indochine. Des prisonniers travailleurs dans l’armée française » publié dans la revue Histoire, le Président Général du Souvenir Français a tenu à faire connaître son point de vue dans un courrier adressé à la Directrice de la rédaction.
Madame la Directrice, Chère Amie,
Il n’est pas dans mon habitude de commenter les excellents articles que publie votre revue que je lis avec grand intérêt tous les mois.
Si je « prends la plume », c’est pour évoquer l’article de Christopher Goscha sur les « Prisonniers travailleurs dans l’armée française » pendant la guerre d’Indochine (revue de mai 2024).
Cet article repose sur la création d’un concept d’égalité entre deux histoires, celle du communisme et celle du colonialisme, concept illustré par la conclusion de cet article qui met au même niveau « l’œuvre » d’Ho Chi Minh et celle de de Lattre.
Deux éléments justifient ce concept :
– D’abord l’égalité dans la mobilisation des masses : « Ho Chi Minh et de Lattre imposèrent deux levées en masse au peuple vietnamien, l’une nationale, l’autre coloniale ».
– Ensuite l’égalité dans le traitement des prisonniers : « Ce qui frappe, c’est le silence total qui règne sur le sort tout aussi tragique des dizaines de milliers de prisonniers de guerre vietnamiens tombés aux mains des Français pendant le même conflit ».
Concernant la levée en masse, supposée égale, l’auteur donne quelques chiffres qui contredisent totalement son propos :
– 1 500 000 civils mobilisés par le Vietminh
– 85 500 prisonniers de guerre dont un certain nombre (combien ?) transférés en « coolies » par les Français.
Où est la levée en masse des colonialistes français ? Où sont les milliers de civils vietnamiens mobilisés par la France pour sauver Dien Bien Phu ?
Concernant l’égalité du traitement entre les prisonniers de guerre, l’auteur prend bien soin de ne citer aucun chiffre dont certains sont pourtant très connus.
Sur les prisonniers de guerre vietnamiens de la France, 65 000 prisonniers ont été rendus en 1954 au Vietminh. La majorité des autres (les fameux coolies) avaient été libérés précédemment.
La même année 1954, sur les 36 979 prisonniers français du Vietminh, 10 754 furent rendus dont 6 132 furent hospitalisés. La mortalité dans le camp du Vietminh fut de 72%, soit supérieure à celle des camps de déportation nazis.
Dès lors, alors que le Vietnam célèbre de manière exceptionnelle le 70e anniversaire de sa victoire à Dien Bien Phu, alors que Dien Bien Phu s’impose comme le centre mémoriel mondial des temps de la décolonisation, définir une égalité entre communisme et colonialisme relève plus d’un choix idéologique que d’un travail d’historien.
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