Le monument et les sépultures du bois des Caures
En 1922, Le Souvenir français décide d’immortaliser, sur le champ de bataille, le sacrifice des 56e et 59e bataillons de chasseurs à pied et de leur chef le lieutenant-colonel DRIANT. A la fourche de la route de Flabas et de Ville-devant-Chaumont, à 20 km au Nord de Verdun, le sculpteur Grégoire CALVET a dressé un imposant monolithe taillé dans le calcaire meusien. De sa face brute émerge une croix latine auréolée. Elle domine sur le roc une perspective de croix mortuaires figurant la nécropole minérale des combattants qui se sont sacrifiés. La première croix est ceinte d’un corps de chasse, symbole des chasseurs à pied. L’ensemble surplombe un banc rocheux, à peine équarri, qui porte en lettres irrégulières « Au Colonel Driant et à ses chasseurs ». Autour, les tombes de treize soldats restés anonymes.
Chaque année, ce haut-lieu est le théâtre d’une cérémonie qui commémore le 21 février 1916, jour du début de la bataille de Verdun et de la lutte héroïque des 56e et 59e BCP.
Le sculpteur Grégoire CALVET (1871-1928)
Formé à l’école nationale des Beaux-Arts, élève de FALGUIÈRE, Grégoire CALVET a consacré son art à plusieurs monuments aux morts. On peut citer ceux de Port-Sainte-Marie près d’Agen (1925) ou de Holnon dans l’Aisne (1926). Il est aussi l’auteur du monument dédié à Antoine GLEY qui ravitailla Paris pendant le siège de 1870-1871 (1911). Il reste connu enfin pour avoir lancé en 1921 l’idée d’une illumination de la tombe du Soldat inconnu, qui aboutira à la création de la Flamme sous l’Arc de Triomphe deux ans plus tard.
Pour le monument DRIANT, l’artiste a travaillé sur le lieu même de l’extraction du bloc, dans la poussière des carrières de Rupt-en-Woëvre, au Sud de Verdun, avant de faire acheminer son œuvre par camion jusqu’à son emplacement actuel.
21 octobre 1922, une inauguration impressionnante
A cette date, sur le plateau encore décharné du bois des Caures, des squelettes d’arbres témoignent de l’ancienne forêt ravagée par le pilonnage allemand. La foule compacte s’est massée devant le rocher immaculé ainsi qu’autour de la haute figure d’André MAGINOT. La veille, les restes d’Emile DRIANT, déposés provisoirement au village voisin de Ville-devant-Chaumont, ont été inhumés sur place en présence de sa veuve.
Les associations de combattants sont venues nombreuses sous leurs bannières. Une garde de chasseurs escorte leur drapeau jusqu’au monument, au milieu d’une multitude d’ancien combattants et de nombreuses veuves. La fanfare des chasseurs salue les couleurs par La Marseillaise. Puis vient le cortège religieux, le monument est bénit, la prière des morts et les chants liturgiques sont entonnés.
Des noms prestigieux venus honorer Driant
Le nombre et les titres des personnalités réunies ne laissent aucun doute sur la stature de celui qu’on célèbre. Elles viennent des mondes militaire, politique et culturel. André MAGINOT, ministre de la Guerre et des Pensions, préside la cérémonie et, avant son discours, lit un message du président du Conseil Raymond POINCARÉ qui décrit DRIANT : « figure de paladin qui s’ajoute à la galerie glorieuse des grandes figures légendaires de la France ». A ses côtés, le général de CASTELNAU, qui ordonna en son temps la défense de Verdun sur la rive droite de la Meuse, évoque l’état d’esprit exemplaire des hommes de DRIANT avant l’assaut allemand. Le capitaine SEGUIN, rare survivant du 21 février 1916, retrace l’âpreté de l’affrontement qui suivit le déluge de feu, pendant deux jours, à un contre dix. Le général MANGIN, vainqueur de Douaumont, est là aussi. Désiré FERRY, député de Meurthe-et-Moselle et ancien combattant, évoque le Driant politique, député de Nancy en 1910. Maurice BARRÈS rappelle quant à lui quel écrivain était Emile Driant, sous le pseudonyme de Capitaine DANRIT, technicien de la guerre et patriote ardent qui collectionnait les succès littéraires. On peut également entendre le commandant BIENAYMÉ DE LA MOTTE déclamer son poème à la gloire du chef héroïque. Enfin, Monseigneur RUCH, évêque de Strasbourg, appelle à la prière et à se recueillir pour le souvenir des morts.
On notera enfin parmi les personnalités rassemblées celle de Victor SCHLEITER, alors premier adjoint au maire de Verdun, qui sera député en 1924, maire en 1925, et, ce qui est déterminant ici, alors Président et Délégué Général du Souvenir Français pour la Meuse. On peut donc le considérer comme le principal artisan du projet de monument au lieutenant-colonel DRIANT et à ses chasseurs dont la célébration demeure un temps particulièrement fort dans le calendrier mémoriel des commémorations de la bataille de Verdun.
Texte écrit par Franck MEYER
Pour en savoir plus sur le lieutenant-colonel DRIANT :
MABIRE Jean, Driant-Danrit, Nancy, Editions le Polémarque, 2015
Contacts :
Patrick ETIENNE, Délégué Général du Souvenir Français pour la Meuse
pjaetienne@hotmail.fr
Maurice MICHELET, Président de Comité du Souvenir Français pour Verdun
micheletmaurice@wilbox.fr
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