L’œil de l’historienne : Chantal Antier

1 mars 2018

Chantal Antier est docteure en Histoire et spécialiste de la Première Guerre mondiale. Professeur d’histoire en retraite, elle dirige la collection Conflits Contemporains aux éditions des Presses Universitaires de Lyon. Elle est auteure de nombreux articles et ouvrages consacrés aux femmes dans la Grande Guerre.

Rôles des Françaises dans la Grande Guerre

 Les femmes françaises, soutiens malgré tout en 1914-1918

Août 1914, la guerre est déclarée…Les hommes de toutes conditions sont appelés sous les drapeaux. A l’arrière, restent les femmes, les enfants et les personnes âgées. Quels vont être leurs rôles ? Dès la déclaration de guerre, ce sont les cultivatrices qui sont appelées les premières pour remplacer les hommes. Le 7 août 1914,  femmes et enfants, sont appelés officiellement par le Président du Conseil, René Viviani, pour terminer la moisson et préparer les vendanges pour remplacer les cultivateurs mobilisés. Dans le cadre de la guerre, L’Union Sacrée des femmes et des hommes réalise ce que la politique n’avait pu réaliser :

 « Au nom du Gouvernement de la République, au nom de la Nation tout entière groupée derrière lui, je fais appel à votre vaillance et à celle des enfants que leur âge seul et non leur courage dérobe au combat. Je vous demande de maintenir l’activité des campagnes, de terminer les récoltes de l’année dernière, de préparer celles de l’année prochaine. (…). Debout donc femmes françaises,  jeunes enfants, filles et fils de la Patrie. Remplacez sur le champ du travail ceux qui sont sur les champs de bataille (…) »

De 1914 à 1916 peu de contestations féminines dans le travail

 Face à cette demande  du gouvernement et en raison d’un féminisme naissant importé des Etats-Unis et de l’Angleterre depuis quelques années en France,   la majorité des  femmes accepte sans se plaindre cette surcharge de travail, qui les met à l’égal de ceux qui combattent.  Les journaux féministes comme celui de Jane Misme, La Française  changent également leur ton revendicatif et égalitaire dès août 1914 :

 «Tant que durera l’épreuve dont souffre notre pays, il ne sera permis à personne de défendre ses droits : nous n’avons envers lui que des devoirs ! ».

Cette obéissance surprend après les manifestations de femmes en  mai 1914 au moment des élections législatives, réclamant sans succès,  la  parité  et  le droit de vote. Le départ en masse des hommes pour une guerre que l’on imagine très courte,  change la donne. Les femmes ne pensaient pas tenir quatre longues années et  voir peu à peu évoluer leurs responsabilités. Ne deviennent-elles pas, par nécessité, des organisatrices et des ‘’femmes d’affaires’’ ? Les Journaux de Tranchées révèlent l’inquiétude des soldats  face à leurs femmes qui  prennent des décisions souvent sans avoir sollicité leur avis, le courrier de l’armée n’arrivant pas rapidement. Les officiers qui écrivent des articles  dans les journaux de Tranchées, n’hésitent pas à les rassurer :

« La femme s’effacera de ces situations qu’elle occupe provisoirement dans l’intérêt même de l’homme. Elle ne sera pas la femme nouvelle que vous redoutez,  elle cessera d’être femme d’affaires, libre, agissante, émancipée… ». Petit Echo du 18° Territorial.

En même temps, les soldats découvrent  le courage de leurs épouses, pendant leurs permissions. Ils décrivent dans le Diable au Cor  de mars 1917,  leur admiration et reconnaissance :

 « Je vois dans les villages de notre beau pays, celles qui remplacent le chef de famille,…. Cultivent la terre, veillent à la bonne marche de l’entreprise, donnent du pain à la nichée, soignent, éduquent… ».

En France 30% de la population travaille la terre et c’est d’abord les femmes dans les exploitations qui vont prendre la relève.

Le poids de la guerre sur les cultivatrices.

 Habituées à travailler avec leurs maris et des employés, le poids de la guerre  impose effectivement aux fermières des difficultés de plus en plus grandes : absence des chevaux réquisitionnés par l’armée, manque de main d’œuvre masculine, départ au front des boulangers d’où moins d’achats de blé et moins de pain, base de l’alimentation des soldats et des civils. En  1916, l’alimentation est insuffisante pour les soldats prioritaires et pour les civils, les restrictions augmentent malgré l’agrandissement des exploitations et la surveillance des intendants militaires.

Ces intendants sont nommés pour surveiller de nouveaux comités agricoles qui doivent assurer la production dans les départements. Ces groupements ne comportent aucune femme, pourtant, la fermière doit appliquer les normes dans son exploitation et remplir les documents réquisitionnant son cheptel, ses productions de céréales ou ses légumes. Or, beaucoup d’agricultrices ne savent pas parfaitement lire ou écrire, en raison des travaux des champs auxquels elles ont souvent participé pendant leurs années scolaires. Si des erreurs se produisent ou si  la mission militaire découvre des ventes illicites aux citadins, ces infractions peuvent mener à la prison. Le Ministre de l’Agriculture et les autorités militaires sont toutes-puissantes. Cette nouvelle manière de cultiver sous surveillance change ce métier qui gardait son indépendance et oblige également les femmes à accepter une nouvelle main d’œuvre inconnue, peu préparée aux travaux des champs qu’il leur faudra nourrir et surveiller.

 Commander une main-d’œuvre inconnue et changeante

 Pour pallier le manque de bras aux moments des grands travaux d’été où de moins en moins  de permissions sont accordées aux soldats-cultivateurs, une main d’œuvre nouvelle et souvent peu préparée aux travaux des champs est embauchée suivant les années : prisonniers allemands, mutilés de guerre, convalescents, réfugiés. Le Ministère des Colonies est mis à contribution, Algériens et Tunisiens viennent travailler la terre. Après la Révolution bolchévique de 1917,  des ‘’Russes blancs’’  exilés  en France trouvent du travail  dans la culture : un département comme la Seine-et-Marne en fera travailler 400. Les  Alliés qui campent au repos dans les villages,  donnent aussi un coup de main.  A partir de 1918, la main d’œuvre est moins nombreuse,  étudiants, écoliers, fonctionnaires sont appelés aux moissons d’où des résultats souvent décevants. L’aide des tracteurs militaires est parfois utilisée pour les grandes exploitations.  L’arrivée des Alliés américains en 1918, oblige le Ministère de l’Agriculture à faire des achats de plus en plus importants de blé mais également de matériel agricole, ce qui facilite le travail. La carte postale d’une agricultrice signale à son mari ce changement :

« Nous avions une moyenne de seize chevaux ; la réquisition, pendant la guerre en a pris sept, et les bons chevaux sont rares et chers. L’année dernière (1917) nous avons eu des tracteurs militaires pour les labours ».

 

Soigner les blessés sans beaucoup de préparation

Si les travaux des champs reposent essentiellement sur les femmes de la campagne, les citadines sont appelées à un rôle aussi  difficile à jouer car l’afflux de blessés réclame de plus en plus d’infirmières. Il faut former des jeunes à ce rude métier. La Croix-Rouge, créée après la guerre de 1870, et des associations de bénévoles offrent leurs services. Au début, l’enthousiasme entraîne des femmes de tous âges et de toutes classes sociales à soigner des patients, mais l’horreur des blessures n’est pas toujours supportée et les hôpitaux peu adaptés à ces soins. On découvre ces manques dès la première bataille de la Marne en 1914 ; des maisons, des fermes reçoivent des blessés  en attendant que des trains les emmènent au sud de la Loire. La  présence de nombreux blessés coloniaux, dès  l’été 1914, et surtout à partir de  juin 1915, amène le Président Poincaré à inaugurer un hôpital le 9 juillet, au nom des  Amitiés musulmanes à Neuilly, il termine son discours :

« J’adresse à tous ces braves gens le salut de la France. Ils ont aujourd’hui une part dans nos deuils et dans nos sacrifices ; ils auront une part dans la victoire ; ils devront aussi avoir une part dans la gratitude du pays ».

 Les infirmières devront s’adapter aux traditions des soldats de ces pays, peu enclins à se faire soigner par des femmes et  ne parlant pas leur langue. Justin Godart, Sous-secrétaire d’Etat à la Santé,  rendra hommage aux infirmières  « que rien n’a rebuté, ni les mois ajoutés aux mois, ni l’horreur des plaies, ni  l’humilité des tâches ! ».

 Comment et où  soigner ces blessés si divers ?

Peu d’Ecoles d’infirmières existent en 1914 en France et les villes n’ont pas toutes des hôpitaux suffisamment grands et équipés. La Croix-Rouge et des associations de bénévoles offrent leurs services. Il faut attendre l’année 1916 pour voir la nomination d’un Sous-secrétaire d’Etat à la Santé, Justin Godart dont les inspections  permettent d’améliorer la situation des blessés, de les faire soigner le plus rapidement possible pour laisser des places libres et renvoyer des soldats au front.

 Les châteaux, soit parce qu’ils sont réquisitionnés, soit parce qu’ils sont offerts par leurs propriétaires, se transforment en hôpitaux avec souvent  une spécificité surveillée par des médecins militaires. Des femmes de la noblesse, ayant fait partie parfois avant-guerre de la Croix-Rouge, n’hésitent pas à participer aux soins, à prêter leurs salons et jardins, à recruter des jeunes filles et à diriger, s’il y a lieu, les équipes d’infirmières :

 « Et c’est ainsi que dans les salles de garde moyenâgeuses, dans les chambres où avaient logé les rois de France, on trouve des lits d’hôpitaux où nos blessés sont soignés avec un touchant dévouement ! ».

Elles conduisent  des ambulances, des autos avec les radios de  Marie Curie et des autochirs, automobiles chirurgicales, pour opérer plus vite au front. Des médailles leur seront remises à Verdun par le général Pétain qui reconnaîtra leur courage. Certaines contracteront des maladies, auprès des gazés ou des tuberculeux dans les hôpitaux où la désinfection ne se fait pas assez rapidement. A l’arrivée en France des soldats alliés venant de l’Empire britannique ou des Etats-Unis, les hôpitaux se multiplient. Plus favorisées, seront les infirmières canadiennes anglaises ; elles obtiennent en 1917,  le grade d’officier et le droit de vote en remerciement de leurs soins et de leur courage, faisant des envieuses parmi les Françaises. Cette récompense est pourtant bien méritée car toutes ces infirmières de l’Empire britannique traversent les océans sur des navires de guerre souvent mitraillés par les sous-marins allemands… et elles ne terminent pas toujours leur voyage jusqu’en France.

Si le travail auprès des blessés apporte de la fatigue mais aussi du réconfort aux infirmières par la reconnaissance de ces hommes qui les appellent les Anges blancs, d’autres femmes embauchées dans des usines d’armement, connaissent un travail très pénible, auquel elles ne sont pas préparées. Leurs photos, debout, avec le sourire, sur les journaux et les affiches servent de publicité mais ne reflètent pas la vérité.

Dans les usines d’armement

L’année 1915  est le point de départ d’embauche de femmes  pour fabriquer des armes de plus en plus sophistiquées. Après la bataille de la Marne, en septembre 1914, où l’Etat-major français découvre le manque de préparation de l’armée et le peu d’armement dont elle dispose,  les ateliers sont remplacés par des usines de la Défense nationale avec des ouvrières pour remplacer les hommes. Les chefs d’entreprise n’acceptent pas volontiers cette main d’œuvre ; il faudra au moins dix circulaires du Ministère de la Guerre pour les forcer à l’embauche. Les lois sur l’insalubrité des locaux sont suspendues dès la fin de 1915 d’où des conditions de travail très difficiles. Les munitionnettes, les obusettes obtiennent  des salaires peu élevés par rapport aux ouvriers, 4 à 5 frs l’heure, mais ce qui est davantage  que leurs allocations de mères de famille seules, soit 1,25 frs par jour et 0,50 frs par enfant de moins de 16 ans.

Elles ne sont pas préparées à ce genre de  fabrication et tombent souvent  malades en raison des longues heures de travail debout, 9 à 11 h,  y compris le dimanche, du poids des obus et  de la rapidité demandée avec  le début de la taylorisation.  Aucune préparation, ni protection ne sont d’abord prévues, certains ateliers ne possèdent même pas d’eau courante ! Les ouvrières se blessent avec des machines et outils peu adaptés à leur taille, remplacés ils sont payées par  les ouvrières elles-mêmes. Elles connaissent des infections par les acides d’où leur teint jaune et le surnom de canarie, la tuberculose se répand.  Sans aides médicales sur place,  elles doivent faire la queue dans les hôpitaux pour être soignées,  le soir après le travail.  La plupart tente de rester pour le gain espéré, même si elles sont enceintes à la suite des permissions, d’où beaucoup de naissances avortées jusqu’en 1917,  où enfin ce problème sera étudié et amélioré.

Revendications des ouvrières

 Plus de 100.000 ouvrières travaillent pour la Défense nationale autour de Paris, elles sont majoritaires dans la fabrication des obus. En 1918, 30% des ouvriers sont des femmes. Les féministes applaudissent  à cette entrée dans le monde du travail. Bien qu’elles doivent reconnaître que leur présence dans ces domaines masculins ne convient pas à toutes les ouvrières, les raisons d’accepter un tel travail est indispensable : raisons financières, restrictions, augmentation des prix de la nourriture, obligation de payer l’emprunt de guerre, entretien des blessés, des soldats et des prisonniers, imposent à toutes ces femmes de tenir le plus possible.  Même les féministes commencent à trouver que le gouvernement profite de plus en plus de leur travail sans chercher à le leur faciliter, sans respecter des temps de repos et sans dédommagements. Des Comités de soutien pour les femmes se créent à Paris comme dans toute la France, réclamant des améliorations dans leur travail. L’année 1917 marque un tournant dans l’Union Sacrée.

L’année 1917 : beaucoup de doutes,  peu d’espoir

 Le titre d’un journal local met bien en relief ces difficultés,  au début de 1918 :

« L’année 1917 ! Année de déception ! Année de mécomptes ! Année de mensonges ! Année de trahisons ! Les Américains risquent de ne pas arriver avant 1919, il faudra rééditer Verdun… mais nos moyens sont autrement puissants qu’en 1916 ! » . La République de Seine-et-Marne  2 janvier 1918.

En avril 1917, l’armée française commandée par le général Nivelle, lance une grande offensive en Picardie sur le Chemin des Dames ; mal préparée, mal engagée, c’est un échec et les pertes sont énormes : 30 000 morts. Les conséquences sur le moral des poilus et de l’arrière sont considérables.

Grèves et mutineries

 La population souffre de nombreuses restrictions, le nombre de veuves augmente, les ouvrières supportent de plus en plus mal les heures de travail imposées dans des conditions difficiles et font grève. Dans le même temps,  la rébellion éclate parmi les soldats : mutineries pendant quelques mois dans les unités suite au désastre du Chemin des Dames, refus de monter au front et parfois attaques d’officiers. Les permissions accordées par le général Pétain ne facilitent pas immédiatement la reprise en main. Les militaires manifestent contre la guerre avec les civils dans les villes, comme le rapportent certains permissionnaires présents à  Paris :

« A Paris, grèves et cortèges au cri de la Paix, rendez-nous nos maris et nos enfants ! A bas la guerre ! Des soldats en tenue en font partie. On signale des désordres à la gare de l’Est dans les trains partant au front ».

Paris, le 1er  mai voit défiler pour la première fois les cousettes, au cri de la Paix  et retour des combattants.  Surpris, peu de syndicats masculins les soutiennent. Les grèves s’étendent aux boulangers, aux agents des tramways départementaux,  aux ouvriers et ouvrières travaillant dans l’armement.  Le pacifisme se développe, la situation est grave dans tous les départements. Les journaux, seuls moyens d’information souvent censurés, de même que de nombreuses lettres des familles ou de soldats lorsqu’elles arrivent à destination,  entretiennent un climat de rébellion et de mécontentement. Voici ce que l’on peut lire dans la lettre d’un militaire retenue par la Censure en 1917 :

« Vive la Paix ! A bas la guerre ! Mort à ceux qui en sont responsables. Je crie du fond du cœur : Vive la Paix ! »

Des lois nouvelles  pour mettre fin aux grèves 

 Devant ces difficultés et ces grèves à répétition, le Secrétaire d’Etat Justin Godart encourage  la création d’Intendantes d’usine. Ce rôle aura double but : transmettre les ordres des directeurs aux ouvrières et faire remonter à celui-ci leurs demandes après consultation de leurs difficultés dans le travail. Cette initiative amène enfin  le gouvernement à promulguer des lois pour apaiser les réclamations, devant le nombre de morts au front : dimanche de repos, salles désinfectées, horaires plus souples. La  loi Enguerrand de 1909est améliorée en janvier 1917 pour encourager les ouvrières, grâce à une allocation de naissance votée  pour protéger la famille. Cette même année pour satisfaire les munitionnettes, quelques  usines de la Défense nationale mettent à la disposition  des jeunes mères de famille, des salles d’allaitement, de garde d’enfants, de repos pour les femmes. Elles peuvent déjeuner sur place mais il leur est interdit de rapporter de la nourriture chez elles. Chaque facilité accordée aux femmes est immédiatement surveillée.

 Le code napoléonien déjà écorné à la veille de la guerre, puisque les femmes peuvent gérer elles-mêmes leurs salaires, change également. Les mères sont tutrices de leurs enfants en l’absence de leur mari au front grâce à la loi Violette.

Ces quelques améliorations de la vie quotidienne sont en fait les principales ‘’récompenses’’ qu’obtiendront les femmes : le droit et même l’encouragement à ‘’faire des enfants’’. Des agricultrices, des infirmières, recevront des Diplômes pour leur travail en temps de guerre, mais elles sont loin de  leurs consœurs féministes en Europe et même en Turquie qui obtiendront le droit de vote.  Si les députés français étaient en faveur de ce suffrage, c’est le Sénat qui, par quatre fois,  refuse le droit de vote aux femmes pour ne pas reconnaître l’émancipation de  la femme en quatre ans de guerre.

Espionnes ou agents secrets ?

Des Françaises comme beaucoup d’Alliées se sont engagées dans les Services secrets quand on découvre  le rôle des espionnes allemandes entrées en France et dans les pays neutres comme l’Espagne,  profitant de l’organisation des Marraines de guerre pour obtenir auprès de  leurs ’’filleuls’’ des renseignements militaires.  Mata-Hari, restée célèbre,  sera fusillée à Vincennes en octobre 1917, d’autres espionnes le seront aussi ou connaîtront la prison pendant de longues années.

Des comédiennes joueront ce rôle important comme Mistinguett, d’autres approcheront des Ministres ou des Chefs d’Etat, parmi elles, Louise de Bettignies ou Mathilde Lebrun. Mais  les chefs de ces espionnes françaises, comme le commandant Gusthal  ne leur font pas totalement confiance :

 «Si en France on n’employa jamais les femmes que contraints et forcés, et avec une instinctive défiance, c’est que nous avons toujours considéré, que leur cœur, leurs nerfs, leurs sens, les empêchaient de jouer jusqu’au bout le rôle ingrat d’espionne ».

Pourtant ces femmes ont joué un rôle important dans  les Services secrets, au péril de leur vie. Elles ne seront reconnues que dans les années 1930 quand elles oseront écrire leurs souvenirs souvent préfacés par un officier supérieur ou un ministre. Avaient-elles peur qu’on ne les croit pas ?

L’arrivée des troupes américaines non seulement sera accueillie avec joie mais les féministes françaises profiteront de cette intervention pour rappeler à leur Chef d’Etat qu’elles méritent elles aussi le droit de vote. Le 7 mars 1918, 400 hommes et femmes se réunissent au Palais de la Mutualité, malgré la police, pour réclamer le suffrage universel, sans succès. Tous les Etats américains accordent le droit de vote en 1920.

L’Armistice 11 novembre 1918

L’Armistice est signé à Rethondes. Parisiens et Alliés se réunissent pour chanter La Marseillaise à Paris autour de Madame Chenal de l’Opéra. Dans cette foule joyeuse, se mêlent tous les uniformes mais aussi beaucoup de rubans noirs de deuil.
Quelle reconnaissance pour les femmes, soutiens des soldats ?  Dès le 13 novembre les ouvrières sont invitées à quitter les usines par la loi Loucheur, avec une indemnité de départ de un mois de salaire si elles partent avant le 5 décembre 1918.  Si les usines de la Défense nationale peuvent payer, de nombreuses petites usines laisseront partir les ouvrières sans aucune indemnisation. Les fabrications d’armes s’arrêtent avec l’Armistice, et il faut que les soldats retrouvent leurs femmes à la maison.

Quelle reconnaissance pour les femmes ?  

Les quelques améliorations législatives dans le but de redonner des enfants à la France, sont en fait les principales ‘’récompenses’’ qu’obtiendront les femmes. Par contre si elles sont dénoncées comme ayant avorté, elles vont en prison. Les journaux locaux sans donner les noms indiquent de quelles villes ou de quels villages elles proviennent !  Quelles différences avec la plupart de leurs consœurs féministes en Europe et en Turquie. Il faudra une Seconde Guerre mondiale pour que les Françaises ‘’résistantes’’ obtiennent enfin le droit de vote.

Cette méfiance vis-à-vis des femmes est sensible également dans les instances internationales d’après- guerre : ni la Société des Nations, ni la Croix-Rouge internationale ne font appel à elles au début de leur organisation. En 1919, Jeanne Bouvier, féministe et cégétiste française écrira dans ses Mémoires : « Je pensais que les hommes en rentrant dans la vie civile sauraient apprécier ce que les femmes avaient fait en leur absence. J’espérais aussi que les années passées dans les tranchées auraient fait disparaître le sectarisme de ceux qui de 1910 à 1912 avaient fait une guerre acharnée aux syndicalistes féminins qui siégeaient à la Bourse de Paris ».

 

Dernier ouvrage paru : Louise de Bettignies, espionne et héroïne de la Grande Guerre, Tallandier  avril 2013.

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